lundi 30 mars 2009

Suite de l'extrait d'Elle c dit (3)

Extrait d'Elle c dit (1)
Extrait d'Elle c dit (2)
Elle se déshabille, et revêt sa tenue. Le vestiaire est hideux, une odeur de moisi, de poussière l'écoeure. Sur le miroir, des traces d'eau séchées. Elle se regarde, réajuste une mèche, comme si lui là haut, allait voir ce détail là, cette mèche là, qui lui donne cet air là. Dans l'ascenseur, l'excitation, le doute aussi, sept jours qu'elle ne l'a pas vu, depuis le claquement de portière. Elle va le croiser, juste le temps de la relève et d'un café. Elle voudrait faire de cette heure, une vie.
Les portes s'ouvrent, elle s'avance, l'air faussement détaché, se redresse, les épaules, la cambrure, les genoux... pff.. si elle n'y prend pas garde, sa démarche est souvent trop nonchalante. Il est penché sur ses classeurs, elle salue tout le monde, un brin en retard. Adossée au placard, elle l'écoute. Il transmet de façon succincte et précise, les dernières décisions médicales. Sa voix est grave, un peu caverneuse, très basse. Elle prend des notes, elle prend la voix. Elle se trouble, il le remarque, et se trouble aussi. L'air autour est chargé, comme à l'accoutumée, peut être un peu plus léger ? Oui, l'air autour a imperceptiblement changé. Il maîtrise, mais elle le sent au plus près d'elle. Il bouge, elle capte son odeur. Il se retourne, la regarde, ils se regardent.

La salle de repos est bruyante, il n'y a pas assez de chaises, certains sont debout, leur tasse de café à la main, il est assis sur le rebord de la fenêtre. Les discussions et les rires fusent. Elle est à l'aise dans cette ambiance, elle plaisante , se détend. Elle s'évade vers la fenêtre. Ils se retrouvent, s'effleurent, les regards s'entremêlent, audacieux.

Les semaines passent vite, un jeu singulier s'installe entre eux. Regards et effleurements toujours plus intenses.

Elle sait que la naissance approche, la femme, le ventre... La plupart du temps, elle reste dans le déni, l'efface, mais lui, elle le sent perturbé, désemparé même parfois. Dans ces cas là, il peut être distant, fuyant avec elle. Elle s'est habituée, le laisse se dépatouiller avec ses affres. Il revient toujours, recherchant désespérément son regard. Elle est toujours là.

La naissance, on y est presque. Le chien existe aussi, ainsi que la maison toute neuve, tout juste terminée, les murs encore vides, les fenêtres sans rideau, la chambre du bébé doit être prête ?

L'enfant est né au petit matin, là, dans le service de maternité juste à côté de la cardio. Sa collègue l'entraîne pour aller le voir, elle résiste, mais se retrouve penchée au dessus du berceau. Elle se sent monstrueuse d'être là, elle regrette déjà. Elle s'entend parler allaitement, sein, lait, épisiotomie, donneuse de conseils, elle suffoque de honte, ne la regarde pas dans les yeux, reste au près du berceau, il lui ressemble. Elle a soudain pitié d'elle, dans son corps déformé par la maternité, le visage fatigué et cerné. Elle se trouve si femme, à côté. Elle a tord de se comparer à elle, celle ci est puissante, elle le ressent. Elle s'étrangle avec un "au revoir" qu'elle ne veut plus jamais réitérer.

C'est le soir de Noël, un mois s'est écoulé depuis la naissance de son enfant. Il se quittent sur le parking, se souhaitent une bonne soirée, ils doivent se retrouver 9h après, en garde du matin. Il lui avait dit, un peu plus tôt dans l'après midi, qu'il était seul ce soir, et qu'il passait la soirée de Noël chez des amis. Anodin ? Elle ne résiste plus et le suit. Appels de phares, il s'arrête au bord de la route, il sort et s'appuie contre sa voiture. Elle se dirige vers lui, et s'arrête à distance, figée de l'expression bouleversée qu'elle lit sur son visage. Les muscles tressaillent, les yeux sont presque noirs et cruels. Il s'approche d'elle dangereusement, la limite est franchie. Le désir défigure ses traits, un son sourd s'échappe de sa gorge, lorsqu'il la saisit, presque brutal. Ils se cherchent, se débattent maladroitement, leurs mains s'affolent, leurs bouches ne se trouvent pas! Le froid s'empare d'elle, il lui refuse sa bouche! Des larmes affluent dans ses yeux, des larmes perdues, d'une origine inconnue, douloureuses et lourdes. Elle ne bouge plus, reste appuyée contre lui, ses bras retombent. Il ne la serre pas, s'écarte et s'éloigne, un vague pardon sur les lèvres, le visage ravagé. Pas comme ça! Elle le voulait, mais pas comme ça! huit mois de désirs retenus s'écroulent en quelques secondes.

Elle est là, au bord de la route, transie de froid, seule, à sa juste place. C'est Noël. Champagne !


A suivre...

8 commentaires:

  1. le désir de l'autre est parfois comme une fièvre qui peut tout autant nous faire atteindre des sommets que nous rendre gravement malades...

    RépondreSupprimer
  2. un jeu singulier s'installe entre eux. Regards et effleurements toujours plus intenses.

    j'aime bien ces moments de jeu et de séduction qui déssinent les prémices d'une histoire .

    rose ! le champagne ...


    t'embrasse ... v'ap

    RépondreSupprimer
  3. Aahh j'aime beaucoup ce texte, je suis avide de lire la suite!

    RépondreSupprimer
  4. L'homme au bois dormant--> Tout est dit.. :)

    Dorham--> un plaisir, votre visite par ici..

    V'ap--> Plus de huit mois d'approche insidieuse... hum.. je crois que j'ai touché à mon seuil de résitance... :)
    Rose... non, Rouge !

    Anonyme--> une signature ? Un prénom ?

    toutaubord--> Elle c surtout écrire quand elle (é)crise... :))

    Passer les rivières--> c'est déjà la suite d'une suite sans suite.. si si , il y en a une.. :)
    merci..

    RépondreSupprimer
  5. Il faudra attendre un peu, pour la suite de cette histoire. Reprendre mes cahiers me demande du temps, je trie, je module pour en publier l'essentiel.

    RépondreSupprimer