jeudi 7 janvier 2010

Les retrouvailles improbables [ l'incohérence ] (4)

Mathilda passe son temps à reformer le mur entre deux. Mur qui s'effondre quand elle le retrouve. Oui, elle se renverse, elle est déstabilisée, car il transgresse ses mécanismes de défense. En tant que femme face à l'homme, elle est pleine de contradictions. Contradictions qui l'inhibent, quelque chose qu'elle n'arrive pas à cerner, qui l'effraie. Elle a toute une collection d'armures qu'elle revêt malgré elle. Elle n'arrive pas à lâcher. Elle sabote. Elle s'empêche de vivre pleinement. Tout son corps parle pourtant. Des pulsions, des désirs, des fantasmes qu'elle touche du doigt, qui sont presque là, elle les regarde à la frontière, mais n'y va pas. Elle reste là. Elle tente de tout maîtriser de peur... De peur.. (?) Le sentiment qu'un morceau d'elle va être arraché.

Maxime est instable, insaisissable. Elle ne comprend pas pourquoi il est toujours là. Il revient, il s'en va. Il est comme un adolescent. Il ne dit jamais où il est, quand il vient, quand il reviendra. Elle tente de rompre, il refuse sans apporter d'argument, sans changer de comportement. Il revient à l'improviste, son sourire sous la fenêtre. Elle lui jette la clé.

La nuit au près d'elle, il s'accroche. Dès qu'elle s'écarte pour tenter de dormir, il se met à trembler, grincer des dents. Des sueurs profuses, des gémissements qui ne s'apaisent que lorsqu'elle le reprend dans ses bras. Elle a l'impression dans ces moments là d'être sa mère plus que son amante. Et pourtant, entre eux, l'entente sexuelle est harmonieuse, d'une exquise sensualité. Alors qu'elle est prête à en retordre, à discuter de leur relation, à la remettre en question, il lui pose un doigt sur la bouche, l'embrasse délicatement sur les yeux, les joues, descend dans le cou et s'en est fini d'elle et de ses résistances. Leurs corps se connaissent se reconnaissent, se mélangent. Ils ne savent plus qui est la main de l'un ou de l'autre, ils se traversent, se superposent.

Elle a mal au ventre quand il s'en va. Tout se passe là. Elle a l'impression qu'il est accroché là. Elle n'arrive pas à rationaliser, à intellectualiser cette relation, elle ne comprend pas. Son cycle est chamboulé, des hémorragies, des douleurs, des retards, elle somatise.
Tous les quatre jours, elle veut rompre. Il la regarde, presque penaud, lui prend les mains et lui dit qu'il ne comprend pas ce qui l'attache à elle. Il dit avoir conscience de ses dysfonctionnements mais qu'il ne peut pas envisager de la quitter. Elle le confronte sur ses sentiments, il n'a pas de réponse rationnelle. Il l'aime et ça le dépasse. Pour autant il ne peut se résoudre à s'engager un minimum avec elle, il transgresse le cadre, il fuit puis revient.
Ils constateront à leur grande stupeur, qu'ils lisent dans leurs pensées. Alors qu' ils n'arrivent pas à s'entendre, à parler d'eux, à envisager une relation stable, ils reconnaissent être connectés en permanence émotionnellement, et se surprennent à penser la même chose au même moment, même lorsqu'ils sont éloignés. C'en est presque épuisant.

Mille neuf cents vingts six ans plus tôt, juste avant de mourir, Lisa serre son fils tout contre elle pour apaiser ses tremblements. L'enfant gémit, fiévreux, effrayé, il claque des dents. Elle même est terrifiée. Dans un dernier râle, elle rassemble tout son amour pour protéger l'enfant. Elle le prend tout recroquevillé contre sa poitrine et son ventre. L'enveloppe dans ses bras, resserrant le châle autour d'eux. Et dans une prière d'amour, ils s'apaisent et se figent dans cette position en fermant définitivement les yeux.

Improbables retrouvailles...
à suivre...
(suite et fin)


13 commentaires:

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  2. onsoir ...

    l'amour et ses caprices , l'idée est là

    les sentiments germent ,presque impalpable
    me manque aux personnages que ce grain de folie nécessaire ,une raisonnable déraison qui les harponnes (façon cupidon)pour remuer les couleurs de l'amour qu ils tu portes en eux .

    bon ! !!!

    sinon je te souhaite une bonne année ,
    ... des dessous noirs pour des nuits blanches , le rire de tes enfants pour te réchauffer ,
    d' en entendre d'autre qui chantent la paix, et la joie , du st émilion et du médoc , des piéces de théâtres rigolotes ,du bon temps et des fou rires , du bonheur si il existe ,

    HEU !!! et quoi d'autre aussi ???

    t'embrasse

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  3. cette relation me fait un peu penser à une danse.. où l'on s'accroche l'un à l'autre avant de se repousser, mais toujours en rythme !
    n'empêche, être à la fois l'amante et la mère, çà doit être plutôt déstabilisant ! ;)

    très belle année à toi et à tes p'tits loups..

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  4. une source, un amour, une déchirure, et toujours le ventre Tout est toujours là Qu'on cesse de nous parler de notre tête.......
    mouette

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  5. Le double fond des mots--> L'amour et ses caprices qui traversent le temps..
    Merci pour tes bons voeux plein d'enthousiasme..
    Je t'embrasse, la très belle Année à toi aussi..

    Babel--> L'accroche entre ces deux là dépasse l'entendement... L'amante, la mère un noeud à élucider...
    Je t'embrasse chère Babel avec à nouveau, tous mes bons voeux 2010..

    Mouette--> Dans la tête, on peut toujours rationaliser, dans le ventre ça se complique, ça attrape... Et en effet c'est là que tout se joue...
    Je t'embrasse Mouette ainsi que ton chéri....

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  6. C'est très beau dans l'expression, dans le récit en lui-même...
    Le fil conducteur ? Ces personnages qui s'enlacent et s'inscrivent dans le temps, leurs esprits se retrouvant dans les générations.

    Les ossements qu'on a retrouvé au cours d'une fouille archéologique ?
    Sinon, rien de spécial...

    Dis-nous tout Colombine !

    Besos de neige fondue
    Jack

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  7. Jack--> perspicace et rassurant... :)Merci.
    La suite très bientôt...
    Bisous de neige qui ne tient pas..

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  8. Je ne sais trop pourquoi ça me fait penser à la mer. Leur attirance ou leur colère, rapprochement et éloignement, sont pour moi synonymes de marée ... un peu comme si l'un ne pouvait pas vraiment exister sans l'autre.

    Toutes ces choses qu'on ressent et celles qu'on ne comprend pas. C'est très bien écrit. Reste la suite, évidemment, et sa question sous jacente : Et Pompéi, alors ?

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  9. Je lis et relis, cherche les liens, tente de comprendre les raisons de cet attachement/ rejet...Ne trouve pas...attends la suite, avec impatience! Bravo!

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  10. "connectés émotionnellement en permanence", j'aurais du mal. Il faut du mystère :))
    SNAKE

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  11. La relation inexplicable est toujours aussi forte.
    Peut-on dans une vie ultérieure retrouver des bribes d'un passé enfoui et en garder une sorte de persistance "mémorienne" qui ne demande qu'à arriver au seuil de la conscience ?

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  12. Jack--> Oui, le temps de apprécier et de faire quelques photos...

    Archie--> La mer... La mère... Un ressac qui traverse le temps...
    Merci.

    Mots d'Elle---> J'avais le sentiment de ne pas avoir bien ficelé mon histoire... Et tu me le confirmes... J'essaierai de faire mieux avec le temps... A la fin, a priori tu devrais saisir.. :)
    Merci d'exprimer tes ressentis, ça fait avancer..

    Snake--> Connectés en permanence, je te l'accorde, c'est épuisant.. Et justement là est le mystère de cette étrange relation...

    Saravati--> l'inexplicable trouvera réponse en effet en arrivant au seuil de la conscience.. Du moins, c'est la seule réponse qui apaisera... Aussi irrationnelle soit elle..
    Bien vu !

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