samedi 16 janvier 2010

Les retrouvailles improbables [ Du rêve, au seuil de la conscience ] (5 et fin)

Maxime lui en fera voir de toutes les couleurs. Les rendez vous manqués, l'inquiétude majorée, les lapins qu'elle mijotera en civet, l'absence, l'attente inconcevable.

Une nuit, au bout du bout de cette histoire toujours inachevée, elle se réveille. L'atmosphère est étrange, elle est dans un lit qui n'est pas le sien, pourtant cette chambre est bien la sienne. Une sorte de brouillard envahit la pièce. Quelque chose de doux s'en dégage. Il est absent à ses côtés, pourtant elle sent sa présence-absence. Elle se laisse tanguer légèrement portée par le ressac.
Abandonnée entre veille et sommeil, elle glisse sur les pentes des pensées qui ne se maitrisent pas, qui n'en font qu'à leur tête.
Soudainement, elle sent un liquide chaud couler entre ses cuisses ! Elle se redresse, rejette les draps et horrifiée découvre un fœtus baignant dans une flaque de sang. En nage, elle se réveille brusquement, rejette les draps, regarde entre ses cuisses. Les draps sont d'un blanc immaculé. Ce n'était qu'un rêve dans un rêve.

Mathilda se lève, et se faufile directement sous la douche. Un besoin irrépressible de se laver. L'eau chaude la débarrasse des dernières scories de ce rêve éprouvant.
Étonnamment, elle se sent en paix. Elle n'a plus mal au ventre. Mathilda retrouve son état normal. Hier encore, elle était là errante dans les limbes de cet amour contrarié, elle en souffrait, et là, tout juste, le sourire de Maxime revient l'émouvoir. Elle se pince. Non, tout va bien. Elle respire.

Mais c'est quoi cette histoire bizarre ? Elle ne s'explique toujours pas la façon dont elle a été attrapée, aux limites de l' insoutenable. Ainsi que la disparition soudaine de tant d'émois. Ce rêve peut s'interpréter facilement. Elle avait l'impression au quotidien qu'il était logé là, au creux de son ventre. Il semble normal qu'elle l'expulse pour le déloger. Son inconscient a œuvré pour elle.
Mathilda reste pour autant interpellée. Elle tourne dans tous les sens un semblant d'explication. Dès leur première nuit, leur inconscient se sont mélangés, la névrose de l'un a trouvé réponse dans la névrose de l'autre ? Recevable, mais bon, pourquoi elle, pourquoi lui ? Elle songe à sa résistance du début, elle ne voulait pas le rencontrer. Friande d'interprétations psycho-machin-choses, Mathilda continue son investigation. Sa mère ne le désirait pas quand il a été conçu, à chercher à avorter ? Tout un tas de réponses s'accumulent mais tout ceci reste très nébuleux.

La matinée touche à sa fin, le téléphone sonne. C'est Maxime. Il semble bouleversé. Elle même est très gênée, elle tient à mettre un terme tout de suite à cette histoire qui n'a aucun sens pour elle. Elle se prépare intérieurement à rompre définitivement. Un point c'est tout, même pas l'ombre d'une virgule. Elle s'étonne de se sentir aussi sûre d'elle.
Il prend la parole, et dans un monologue, il lui raconte l'étrange rêve qu'il vient de faire. Il arrive à la galerie d'art, entre dans son bureau et découvre deux inconnus en train de copuler. Désagréablement surpris, il est pris de nausées, sa tête tourne. La pièce se remplit de signes noirs, des + et des - envahissent le bureau, de plus en plus nombreux. Il n'arrive plus à respirer, il sent qu'il va mourir. Dans son affolement il aperçoit un grand trou dans le sol. Il s'y jette comme absorbé. Il dégringole dans ce puits sans fond, ses mains ripent contre la paroi. Il veut se raccrocher. Il va mourir... Dans un dernier sursaut, ça y est il s'accroche... Et se réveille.
... Silence.
Dans l'esprit de Mathilda, tout va très vite. Elle a vite fait de trouver du lien entre leurs deux rêves surgis au même moment. Elle lui raconte le sien.

Ils restent tous les deux sans voix. Ému, il l'écoute attentivement. A bâtons rompus, ils évoquent toutes les hypothèses, réunissant tous les faits étranges particulièrement perçus et ressentis par Mathilda pendant les trois mois qui viennent de s'écouler.
Il accepte aussi de rompre. Accepte que cette histoire s'est construite sur des bases hors du commun et en distorsion avec la réalité.
Ils n'arrivent pas à raccrocher. Ils se connectent sur Msn. Dans leurs webcam respectives ils croisent leurs regards embués. Il lui sourit une dernière fois. Elle craque une dernière fois. A ce sourire, l'émotion est à son comble, les larmes roulent...

Dans un soucis d'apaisement, et pour rendre jolie la fin de cette histoire, elle tapote sur son clavier : "Et si tu avais été mon fils dans une vie antérieure ? Je n'y crois pas vraiment, mais, et si c'était vrai ? Ceci expliquerait cela..."
Il ne la lâche pas du regard tout en répondant : "Oui, on va le dire comme ça, ça me va. C'est suffisamment tordu pour stopper toutes ces questions sans réponse. Et paradoxalement j'y trouve une réponse rationnelle. Mais, on se serait connus où et quand ?
A elle de répondre :" A Pompéï, il y a mille neuf cents vingts six ans..."
Dans un sourire partagé, ils éteignent l'ordinateur.

Les ondes auraient-elles le pouvoir de permettre d'improbables retrouvailles ? ...

9 commentaires:

  1. La boucle est bouclée, les symboles expliqués, l'histoire d'amour terminée, pas si sûr, et pourtant...
    La science-fiction donne un sentiment mécanique, voire inéluctable, dans les histoires d'amour. Comme si s'inscrire dans un mode génétique ou un destin moléculaire, cassait un peu le romantisme et le côté exceptionnel de cette aventure humaine...

    Merci du voyage et de ta plume, Colombine !
    Besos
    Jack

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  2. Jack--> C'est voulu, si tu vois ce que je veux dire... :)
    Merci.
    Bises et bon We

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  3. Expliquer le temps qui passe, comprendre les attachements, les amours et les désamours. Une fable moderne édulcorée par l'envie pénétrante de savoir comment et où nous mènent les sentiments. A lire et à relire de bout en bout sur calaméo

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  4. Arf, en s'amusant on s'est précipité avec le Calaméo (beuh, y'a des fautes)...
    Les sentiments nous font voir à travers un prisme, et l'imagination devient débordante.... :)
    Trouver des réponses qui apaisent, aussi irrationnelles soient elles... :)

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  5. bonsoir m'zelle

    l' aura tragique et magique d'une histoire,
    de neige et de feu ,

    un voyage avec lequel il n’y a pas d’unité de temps ,
    tout y est très vertical et plonge dans le profond espace temps ,
    un espace ayant amoureusement gardé dans cet endroit d"entre les siècles
    la mémoire des émotions

    celle où est suspendu
    ce que la vie suppose d'abandon et de renoncement au désir ,
    au pouvoir immédiat de l'acceptation du destin et de l'amour .

    bises ...

    ;o)

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  6. gloups... que de chemin entre Pompéi et MSN... et que de larmes aussi...

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  7. C'est une bonne idée, ce "raccourci historico-temporel" :)Quant à l'histoire, elle est triste bien sûr, comme une histoire d'amour, quoi !
    Merci, Colombine !

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  8. Thierry--> Tiens je pensais que la ligne du temps était horizontale.. ?
    Ta phrase résume bien l'histoire " Un espace ayant amoureusement gardé dans cet endroit d'entre les siècles, la mémoires des émotions"...
    Merci, je t'embrasse.

    Char'l--> Non, pas tant de larmes.. Juste une trop forte émotion irrationnelle ...

    Archie--> Et oui, les histoires d'amour sont souvent contrariées...
    Merci.

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